Louis Thannberger : « La Bourse et la presse sont une arme thermonucléaire »

Louis Thannberger : « La Bourse et la presse sont une arme thermonucléaire »

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Celui qui a fait la fortune de certaines familles lyonnaises en les accompagnant en Bourse revient à Lyon. Il vise les jeunes patrons en mal de financement.
— Photo : Le Journal des Entreprises



Quelles différences remarquez-vous entre les entreprises que vous accompagnez en Bourse aujourd'hui et celles d'hier ?

J'ai devant moi une génération de jeunes dirigeants dont les entreprises sont sur des créneaux qui n'existaient pas il y a quatre ou cinq ans. Leurs activités font partie de la révolution économique qui se prépare, avec des métiers nouveaux qui affichent d'emblée des perspectives mondiales.


Vous dîtes que la Bourse est davantage une opération de communication que financière. Pourquoi ?

Si j'ai pu réaliser 400 entrées en Bourse parmi lesquelles Cegid et Seb, c'est grâce aux journalistes ! Personne ne fait confiance aux jeunes pousses en France. Avec la Bourse, la médiatisation et la communication qui l'accompagnent, ces jeunes entreprises deviennent visibles et crédibles. Le chef d'entreprise est ainsi reconnu par le suffrage universel des investisseurs. Pour une jeune entreprise, la Bourse et la presse sont une arme thermonucléaire. La Chine a parfaitement compris ça. Ils n'ont eu aucun préjugé pour passer en un clin d'oeil d'une économie administrée à une économie socialiste de marché. Ce qui leur manque, c'est la notoriété d'une marque. Il y a trois ans d'attente pour entrer à la Bourse de Shanghai. Ils savent bien tout ce que la Bourse peut leur apporter.


Comment procédez-vous aujourd'hui avec les PME lyonnaises ?

Nous ne sommes pas là pour faire un hold-up dès le premier jour et s'en mettre plein les fouilles. Mieux vaut faire plusieurs augmentations de capital et que l'argent soit bien utilisé à chaque étape pour faire progresser le chiffre d'affaires plutôt que viser un gros montant. L'argent rend bête et fou. Je compte accompagner une dizaine de jeunes entreprises lyonnaises en Bourse par an.


Comment détectez-vous les entreprises à potentiel ? Est-ce vous qui allez frapper à leur porte ?

Le problème de notre pays, c'est qu'il manque de vendeurs. Et la Bourse n'échappe pas à la règle. Moi, je vends la Bourse. Comment je détecte les entreprises ? Secret absolu ! Mais je peux vous dire qu'il faut que le chef d'entreprise soit un guerrier, qu'il ait un produit excellent qui va plutôt s'imposer sur le marché mondial. Le chef d'entreprise est la priorité. Il a la Bourse qu'il mérite. Chaque fois que je me suis loupé, c'était sur l'homme, pas sur le dossier. Quant aux secteurs d'activité, on ne parle en ce moment que du bio. Or, le luxe n'est pas du bio et ça fonctionne très bien. Certes, il faut que le produit soit un peu sexy mais avoir des a priori est une faute et c'est injuste. Le marché fera sa sélection.


En tant qu'ancien banquier, quel regard portez-vous sur les banques et le capital investissement ?

Il ne faut pas dire que les banques ne font plus crédit. Elles n'ont plus le droit d'en faire suite à Bâle III. Le crédit est très rare et elles le restreignent. Avec la Banque, c'est "Montre moi ton bilan, je te dirai qui tu es". Elle se fait remettre une photographie du passé avant d'agir et de donner. Alors qu'à la Bourse, on parle d'avenir. Quant au capital développement, il fige les choses. Celui qui paie commande. En Bourse, c'est la liberté !


Comment voyez-vous le milieu des affaires lyonnais ?

J'ai beaucoup suivi ces derniers mois les actions de Gérard Collomb à l'étranger pour attirer des investisseurs et ses prises de position dans la presse. Il a compris qu'il faut aller au-devant des investisseurs et que l'économie a pris le pouvoir sur la politique. Lyon est une ville de gens d'affaires. Tout ou presque a été inventé ici. L'industrie y est encore très forte, ce qui n'est pas le cas des autres régions françaises, et encore moins à Paris. Gérard Collomb a l'économie pour lui pendant que d'autres débattent du mariage pour tous.