Aucun "syndrome de l'imposteur" en vue pour Fabrice Faure, lauréat du Prix de l'Autodictacte (Mazars) en 2015. Président-fondateur d'une entreprise dont la valeur a été multipliée par cent depuis sa création en 2005, il a pourtant choisi de faire entrer BNP Paribas au capital, en décembre dernier. « Je voulais une très belle signature à nos côtés » explique le dirigeant, perché dans son bureau mezzanine au 7e étage d'un immeuble de Gerland. L'homme a la carrure de rugbyman détient désormais 82,5 % des parts du capital social (11,14 millions d'euros). Ses cinq principaux cadres en possèdent 1,5 % chacun et l'organisme bancaire 10 %. « Nos partenaires peuvent parfois s'interroger sur notre solidité. Cette entrée au capital nous donne de la crédibilité et peut nous aider à réaliser de nouveaux projets de croissance externe » signale-t-il.
C'est d'ailleurs chose faite depuis le 6 janvier dernier. Fabrice Faure a repris une société d'intérim nommée CGR, détenue par Luis Figuerola, un octogénaire qui a créé ce groupe il y a 51 ans : 24 agences, 65 salariés faisant travailler 1.000 (et non 10 000 comme indiqué par erreur dans notre version papier) intérimaires pour 45 millions d'euros de chiffre d'affaires. L'achat a été réalisé à 25 % sur fonds propres et le solde via un pool bancaire conduit par la Banque Populaire, composé de BNP, CIC Lyonnaise de Banque et Banque Rhône-Alpes.
Valeur ajoutée
« C'est une opération gagnante pour nos deux sociétés » prétend Fabrice Faure. CGR est très implantée dans le sud-ouest de la France mais aussi à Douai, Marseille, Paris et sa couronne. Le dirigeant a déployé deux cadres qui rencontrent les équipes et doivent uniformiser à la fois des outils, des process et des résultats parfois très hétérogènes selon les agences. Particularité de ce dossier : le réseau CGR ne dispose pas de site internet... « La marche est donc significative pour espérer gagner en valeur dès la première année », glisse Fabrice Faure. Ce rachat est un cap pour l'entreprise dont le nom signifie " Les Intérimaires Professionnels ". Elle grandit depuis douze ans essentiellement par croissance organique. La société se place dans le troisième peloton du travail temporaire constitué de PME réalisant moins de 200 millions d'euros. Avec 280 salariés, un volume de 5.000 intérimaires, le réseau LIP Intérim a réalisé 125 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2016, et compte atteindre 190 millions en 2017. Soit un volume de ventes multiplié par cent depuis la création en 2005.
Forte personnalité
La réussite de l'entreprise tient évidemment à la personnalité de son dirigeant : sans complexe et très direct. Son style managérial consiste à se reposer sur des hommes et des femmes pour lesquels il ressent un "coup de coeur". Celui qui a lâché le lycée à 17 ans pour s'engager dans l'armée, avant de revenir dans la vie civile par... l'intérim, ne se rêvait pas chef d'entreprise. Il l'était pourtant sans le savoir. Ainsi son prochain projet s'appuie d'ailleurs sur « une belle rencontre », avec Corinne Lampin, 50 ans, ex-dirigeante d'une société de service d'accueil. Il la charge d'ouvrir une filiale en Suisse, deux ans après un « échec cuisant » tenté de l'autre côté des Alpes. Si l'opération est réussie, elle lui permettrait selon Fabrice Faure d'ouvrir rapidement quatre autres agences helvètes.
Deux types de clients
En parallèle, LIP Intérim vise l'ouverture de 10 agences par an en France plus une chaque année dans une capitale européenne. Sans s'arrêter aux freins conjoncturels. « Comme entreprise spécialisée dans le BTP (mais aussi la métallurgie, le transport et le tertiaire), nous avons ressenti les effets de la loi européenne favorisant le phénomène des travailleurs détachés. Mais il n'y a pas eu de ralentissement brutal. La philosophie de LIP est, à l'image de son dirigeant, pragmatique : « soigner ces deux types de clients. À la fois les entreprises qui ont des besoins en recrutement, et les intérimaires qui nous font vivre ».
