Comment la Chine nourrit la croissance d'Adisseo
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Comment la Chine nourrit la croissance d'Adisseo

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Racheté par le conglomérat Chem China en 2006, Adisseo est devenu un poids lourd de la nutrition animale, générant 95 % de ses revenus hors du marché hexagonal. Revendiquant un ancrage régional fort, le groupe d'origine auvergnate construit une nouvelle usine XXL en Chine et déploie une stratégie d'acquisitions à l'échelle mondiale.

Depuis 2006, le groupe d'origine auvergnate Adisseo a triplé son chiffre d'affaires grâce au marché chinois. Il garde un fort ancrage régional, comme ici avec son usine des Roches-Roussillon en Isère — Photo : Adisseo

Né en 1939 dans la petite ville de Commentry, au cœur de l’Allier, Adisseo est aujourd’hui un mastodonte. Un colosse placé numéro deux mondial – derrière l’allemand Evonik – dans la production d’additifs pour l’alimentation animale. En moins de quinze ans, il a su tripler son volume d’affaires, évalué à 1,4 milliard d’euros (dont 5 % seulement générés en France). La raison de cette poussée hors-norme ? D'abord un développement intensif sur l’ensemble de la région : Adisseo est historiquement présent en production en Isère, à Saint-Clair-du-Rhône et à Salaise-sur-Sanne sur la plateforme des Roches Roussillon.

Mais aussi et surtout son rachat en 2006 par le conglomérat chinois Chem China, leader dans son pays de l’industrie chimique, également propriétaire à Lyon de Bluestar Silicones (ex-Rhodia). « Cette opération a été un accélérateur incroyable et nous a fait changer de stature en Chine, premier marché mondial de la nutrition animale », précise Jean-Marc Dublanc, PDG du groupe d’origine auvergnate, côté depuis 2014 à la Bourse de Shanghai1. Un double ADN qui permet, jure le dirigeant, à Adisseo de revendiquer « une origine française – véritable gage de qualité – tout en étant chinois en Chine. »

Une usine à 500 millions de dollars

Adisseo, qui compte toujours près de 1 000 salariés en région Auvergne Rhône-Alpes (sur 2 200 au total), penche désormais vers l’Empire du Milieu. C’est là que son empreinte est en effet appelée à se renforcer. « Le fait de battre pavillon chinois est stratégique. Cela nous permet d’accéder à ce marché très en demande de nos produits de croissance comme la méthionine, un acide aminé qui améliore les performances animales et génère 50 % de notre chiffre d'affaires mondial », explique Jean-Marc Dublanc.

La demande sur ce segment y est telle que la maison mère d’Adisseo finance à grands frais une nouvelle usine qui jouxte l’actuelle à Nanjing, dans la province du Jiangsu. Opérationnelle en 2020, cette unité dernier cri – dont le coût est évalué à 500 millions de dollars ! – permettra de doubler sur place la production de méthionine. Et ainsi d’atteindre un volume de 360 000 tonnes par an. « Cet investissement va conforter notre position de producteur low cost de méthionine », appuie la direction d’Adisseo.

« Nous voulons atteindre une croissance à deux chiffres de notre volume d’affaires »

De nouvelles acquisitions en vue

Le groupe auvergnat entend par ailleurs accélérer sur ses deux autres métiers, que sont la production de vitamines et celle de produits spécialisés (comme les probiotiques ou autres antioxydants). Le board d’Adisseo a pour cela validé un plan stratégique, dit, de croissance durable. « Notre objectif est d’accélérer pour atteindre une croissance à deux chiffres de notre volume d'affaires », détaille Jean-Marc Dublanc. Ce qui passera presque à coup sûr par des acquisitions, prévient-il.

Un an après son rachat du belge Nutriad (CA 2018 : 100 millions de dollars), fabricant d’additifs alimentaires spécialisé notamment dans l’aquaculture, Adisseo cherche ainsi de nouvelles cibles. « Américaines, européennes, asiatiques… l’origine de l’entreprise ciblée n’est pas notre critère prioritaire. Nous cherchons avant tout des acteurs en mesure de compléter notre gamme et de renforcer nos activités existantes. »

1,6 milliard d’euros investis depuis 2006

Autre axe fort de développement : l’innovation, alors qu’une équipe de 200 chercheurs, répartis entre Commentry et Roussillon, planche déjà sur les procédés chimiques du futur. « Pour conforter notre position, il est indispensable d’investir massivement dans la recherche », rappelle Jean-Marc Dublanc, pour qui cette présence régionale des équipes R&D du groupe ne doit pas faiblir. Chem China injecte chaque année environ 50 millions d’euros dans l’outil de production d'Adisseo. Depuis 2006, il a investi « 1,6 milliard d’euros, dont près de la moitié est allée dans les unités françaises du groupe », stipule la direction financière.

Une nouvelle station de traitement des eaux est d’ailleurs en construction sur le site de Commentry. Montant de l’opération : 20 millions d’euros. Cette unité, qui sera inaugurée en 2020, est censée répondre aux nouvelles directives européennes mises en place en 2021, qui imposent une réduction de la consommation en oxygène et une réduction du traitement des boues.

1 Une entrée en bourse toutefois minoritaire puisque le groupe Chem China détient toujours 89 % du capital d’Adisseo.

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