Bas-Rhin
Mathis : "Le chantier des Jeux de Paris est le plus visible mais pas le plus conséquent"
Interview Bas-Rhin # BTP

Frank Mathis directeur général de l’entreprise familiale Mathis "Le chantier des Jeux de Paris est le plus visible mais pas le plus conséquent"

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L’entreprise de construction bois Mathis, installée à Muttersholtz dans le Bas-Rhin, intervient sur plusieurs chantiers des Jeux de Paris, l’événement olympique qui se tiendra en 2024. Son directeur général Frank Mathis détaille les projets de cette société familiale implantée depuis deux siècles au cœur du village.

Frank Mathis tient les rênes de l'entreprise familiale de construction bois alsacienne Mathis. — Photo : Anne Milloux

L’entreprise familiale Mathis (200 collaborateurs ; CA 2021 : 45 M€) intervient actuellement sur plusieurs chantiers en prévision des Jeux de Paris. Quels sont-ils ?

Nous exerçons deux métiers : la construction de bâtiments en bois en réponse à des appels d’offres publics ou privés (70 % de l’activité) et la construction de bâtiments publics clé en main (30 % de l’activité), comme des écoles ou des gymnases, à destination de petites communes jusqu’à 20 000 habitants. Nous intervenons principalement en France, avec des chantiers épisodiques à l’étranger. Dans le cadre des Jeux de Paris, nous intervenons sur les chantiers du Village des athlètes, du centre aquatique de Saint-Denis, de l’Arena, du siège du Cojo (comité olympique, NDLR) et du Grand palais éphémère. Nous avons commencé en 2019 et ceci représente 30 millions d’euros étalés sur cinq ans. Les chantiers doivent être terminés d’ici fin 2022. Ces chantiers liés aux Jeux de Paris sont les plus visibles, mais pas les plus conséquents pour nous. Nos carnets de commandes sont pleins pour un an et demi. Avec de grands chantiers comme un futur campus à Nanterre sur 125 000 m², nous estimons pouvoir atteindre les 60 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022.

Vous venez de boucler un investissement pour augmenter vos espaces de stockage. La crise sanitaire a-t-elle affecté votre activité ?

Lors des confinements, les chantiers ont été ralentis dans leur phase d’études. Notre entreprise n’a quasiment pas fermé et l’usine a tourné à petite vitesse dans ces périodes-là. Entre 2019 et 2020, nous avons enregistré une baisse de chiffre d’affaires de 10 %. Entre 2020 et 2021, il a crû de 20 %. Notre site s’étend sur six hectares à Muttersholtz, dont 20 000 m² d'espaces couverts. Nous venons de réaliser un bâtiment de stockage de 1 000 m² et prévoyons un nouveau hangar de stockage de 1 500 m² et des lignes de fabrication en 2023, pour des investissements de l’ordre de 500 000 euros à un million d’euros. Nous louons également des bâtiments de stockage de matières premières à Sélestat (Bas-Rhin) et des bâtiments d’assemblage en région parisienne.

Vous employez 200 salariés et en avez embauché une quarantaine ces deux dernières années. Vous ne semblez pas rencontrer de difficultés de recrutement comme c’est le cas dans de nombreux secteurs…

Nos derniers recrutements l’ont été dans tous les services, à des fonctions support, à l’ingénierie, à des postes d’opérateurs ou encore de poseurs. Les chantiers que nous réalisons intéressent et nous n’avons pas de difficultés à recruter. Nous mettons en œuvre un parcours d’intégration conséquent pour imprégner l’équipe de l’esprit maison : passion, responsabilité et innovation. L’entreprise fondée en 1809 en est à sa septième génération de dirigeants, dont cinq dans la même famille. J’ai moi-même trois enfants, dont un fils ingénieur qui a rejoint l’entreprise en tant que chargé de projets. Je peux ainsi envisager sereinement la transmission de l’entreprise.

En tant qu’acteur de la filière bois, vous contribuez à sa structuration régionale. Vous avez d’ailleurs été lauréat d’un appel à projets national dénommé "industrialisation de produits et systèmes constructifs bois et autres biosourcés". De quoi s’agit-il ?

Dans le cadre du Plan de relance, le gouvernement a souhaité développer la seconde transformation du bois. Nous avons présenté un projet pour tendre, à moyen terme, vers l’utilisation de 100 % de bois français. Actuellement, il représente 30 % du bois utilisé, venant du Grand Est et du Massif central. Nous nous approvisionnons en Europe pour le reste. Nos bois proviennent de Finlande, de Suède, d’Autriche ou encore d’Allemagne et sont, pour le moment, de meilleure qualité que le bois français. L’objet de cet appel à projets est de travailler à la qualification du bois chez nos fournisseurs, de suivre un cahier des charges et de faire un investissement matériel pour trier le produit de qualité. Il s’agit d’un investissement de quatre millions d’euros pour le tri, la qualification des sous-traitants et l’équipement matériel. C’est un effort mais nos clients sont prêts à payer plus cher pour du bois français - 10 % plus cher sur la matière, pour un prix final de 5 % plus cher.

Sans cet appel à projets, votre démarche auprès de la filière française du bois aurait-elle été autre ?

Sur ces quatre millions d’euros, les subventions liées à l’appel à projets devraient en représenter 20 %. Cet appel aide à aller plus vite dans la démarche. Nous avons déjà de l’expérience avec la filière française puisque nous avons déjà réalisé des constructions avec du bois 100 % français. Le dernier en date, le nouveau siège de l'Office national des forêts en région parisienne, a été livré fin mars. Nous avons également travaillé sur la reconstruction du stade de Furiani en Corse en 2012, tout comme le siège du centre technique du bois en 2016 ou encore à la réalisation d’une école dans les Vosges avec du bois venant de la forêt de la commune.

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