« Les entreprises sont devenues une annexe de l’administration sans jamais être gagnantes »
Interview # Juridique

Guillaume Unternehr et Jean-Luc Kirchgessner du cabinet d’expertise comptable Sadec Akelys Guillaume Unternehr et Jean-Luc Kirchgessner du cabinet d’expertise comptable Sadec Akelys « Les entreprises sont devenues une annexe de l’administration sans jamais être gagnantes »

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Guillaume Unternehr, directeur de bureau du cabinet d’expertise comptable Sadec Akelys à Strasbourg et Jean-Luc Kirchgessner, associé dirigeant du même cabinet (CA groupe : 32 M€ de CA ; 360 collaborateurs dans le Grand Est), reviennent sur les dernières évolutions législatives auxquelles les entreprises doivent se conformer.

Guillaume Unternehr (à gauche), directeur de bureau du cabinet d’expertise comptable Sadec Akelys à Strasbourg et Jean-Luc Kirchgessner, associé dirigeant du même cabinet, accompagnent leurs entreprises clientes dans la mise en conformité des évolutions législatives. — Photo : Lucie Dupin

Le Journal des Entreprises : Le nouveau Règlement général sur la protection des données (RGPD) entre en vigueur le 25 mai, comment abordez-vous la mise en conformité des entreprises ?

Jean-Luc Kirchgessner : Le RGPD est une bonne chose pour la protection de la vie privée, car il est nécessaire de réguler toutes les informations qui circulent. Cependant, les services de contrôle doivent faire preuve d’indulgence et reconnaître la bonne foi de la structure engagée dans un processus de mise en conformité. Auprès de nos clients, nous proposons différents services pour la mise en conformité. Pour les TPE et PME, nous disposons d'un guide détaillé qui cartographie outils et logiciels de sécurité. Pour les grosses entreprises, nous conseillons de nommer un data privacy officer, anciennement connu sous le nom de correspondant informatique et liberté.

Les PME et les ETI posent des questions, mais les TPE sont mal informées. Pourtant, elles détiennent également beaucoup de données. Le message est peu passé, certains clients ne savent pas ce qu’est la notion de RGPD. Ce qui est dommageable, c’est que les mêmes règles sont appliquées aussi bien à un grand groupe qu’à un artisan et si les structures ne sont pas en conformité, une pénalité, allant jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires, peut être appliquée.

Le prélèvement à la source entrera en vigueur au 1er janvier prochain. Comment les entreprises s’y préparent-elles ?

Guillaume Unternehr : Les entreprises vont recevoir les taux d’imposition de leurs salariés transmis par les services fiscaux. Les déclarations de revenus faites en 2018 sur les revenus 2017 serviront de base de calcul du taux applicable en 2019. Le Trésor public transmettra l’information aux entreprises pour éviter des flux continuels entre salariés et employeurs.

« Les entreprises ont le sentiment de faire le travail de l’administration. »

Un travail de pédagogie et de communication va devoir être fait, et ce, sur deux axes. Les chefs d’entreprise se posent la question en termes de ressources humaines, afin de traiter ces données. Du côté des salariés, nous redoutons un effet psychologique de perte de salaire. C’est la raison pour laquelle les logiciels de paie proposeront, dès le quatrième trimestre 2018, une simulation sur les bulletins de salaire. Pour autant, avec le prélèvement à la source, les entreprises ont le sentiment de faire le travail de l’administration, ce qui ajoute une tension, un stress et un coût supplémentaires.

Au 31 mars dernier, les entreprises ont eu à se soumettre à une nouvelle réglementation : elles doivent désormais remplir un "registre des bénéficiaires effectifs". De quoi s'agit-il ?

G.H. : Dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, les entreprises ont eu l’obligation, avant le 31 mars dernier, de déclarer, auprès du greffe dont elles dépendent, l’identité de ses bénéficiaires effectifs [soit toute personne physique détentrice, directement ou indirectement, de plus de 25 % du capital ou des droits de vote de ladite entreprise, ou exerçant un pouvoir de contrôle sur ses organes de gestion ou de direction, NDLR].

Il s’agit d’une source de paperasse et d’un coût pour les entreprises qui n’en retirent pas de valeur ajoutée, mais une charge de travail supplémentaire. Les entreprises ont le sentiment d’être devenues une annexe de l’administration et ses correspondants permanents, sans jamais être gagnantes.


Livre 100 questions pour comprendre le bulletin de paie, Stéphane Liziard, Gereso Edition.

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