French Tech Alsace : Ce que ce label peut apporter à la région

French Tech Alsace : Ce que ce label peut apporter à la région

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L'Alsace concourt au 2e tour de la French Tech afin d'intégrer « l'équipe de France du numérique ». Le but, donner envie aux investisseurs privés de croire aux start-up françaises. Le ministère de l'Économie s'apprête à rendre sa décision. Quels sont les enjeux dans la région ?
— Photo : Le Journal des Entreprises

« Il y a trois ans, nous n'aurions pas forcément imaginé le rapprochement des deux villes pour déposer un dossier commun en tant que pôle métropolitain Strasbourg-Mulhouse. Or, dans le cadre de la future grande région, l'Alsace constitue un territoire à part entière et les métropoles ont besoin de travailler ensemble » pointe Jean Rottner, maire de Mulhouse. Le pôle candidate pour la première fois au label French Tech déjà attribué à l'automne à Lille, Nantes, Rennes, Bordeaux, Toulouse, Aix-Marseille, Grenoble, Lyon et Montpellier et espère intégrer l'équipe de France des territoires numériques pour gagner en visibilité autour de ses projets innovants. Pour Catherine Trautmann, vice-présidente de Strasbourg-Eurométropole, il s'agit de « passer d'une économie industrielle forte à une économie numérique. La base industrielle du territoire est confrontée aux enjeux de la reconversion économique et la révolution digitale autour d'un écosystème de start-up. Je suis raisonnablement confiante, tout en veillant à ce que le dossier soit le meilleur possible, on joue gros », sourit celle qui est à la tête du développement économique et de l'attractivité de l'Eurométropole.




La confiance des investisseurs

La Mission French Tech, en visite en Alsace en avril dernier pour rencontrer les protagonistes du dossier, a prévenu : il n'y aura pas de troisième tour de candidature. Le label, attribué aux heureux élus en juin, sera accordé pour trois ans. Il vise à agir comme un gyrophare afin d'alerter les investisseurs du potentiel des territoires numériques labellisés. « Il existe des idées reçues quant à la difficulté d'entreprendre en France. Pourtant, nous disposons d'un vivier d'ingénieurs très qualifiés. Il faut faire changer le regard sur la France » détaille Marie Gallas-Amblard, directrice de la communication de la Mission French Tech. Jean Rottner estime lui « qu'en France, la levée de fonds est difficile et il est nécessaire de donner confiance aux investisseurs privés ». L'enjeu du label, si celui-ci n'accorde pas de subvention directe aux écosystèmes French Tech, est tout de même d'ouvrir les portes d'un fonds doté de 200 M€ destiné aux accélérateurs de start-up des pôles French Tech. Strasbourg-Mulhouse est déjà doté de l'incubateur du SEMIA et du pré-incubateur d'e-nov Campus. Sur les recommandations de la French Tech, le pôle fait figurer un accélérateur au dossier




pour permettre aux start-up lancées d'accéder à la capitalisation privée.


Territoires complémentaires



Outre la démarche de rapprochement, le dossier joue avant tout sur la complémentarité des territoires, le tout porté par des acteurs aussi bien publics que privés. Selon Gérald Cohen, maître de conférence à l'Université de Haute-Alsace, « la mise en commun du dossier répond à un effet volume. Strasbourg ou Mulhouse seuls ne jouent pas sur la même échelle que Paris ou Lyon par exemple. Ensemble, nous sommes complémentaires ». À Mulhouse, lorsque les industries textiles se sont automatisées et ont externalisé leur système d'information, la création d'entreprises du numérique s'est ressentie pour répondre à cette évolution. De plus, la proximité à Bâle a favorisé l'essor du numérique pour répondre à la demande de la cité suisse. Celle-ci s'est concentrée sur les biotechnologies et a fait appel à Mulhouse pour les compétences numériques. « En conséquence, la dynamique de l'usine 4.0 était préexistante et l'essor de la French Tech est venu conforter ce mouvement » résume Gérald Cohen. Le territoire strasbourgeois est quant à lui reconnu pour l'e-santé et les biotechnologies, notamment autour du biocluster des Haras, de l'IRCAD et de l'IHU.




L'atout du transfrontalier

De par sa position géographique, le pôle métropolitain fait également valoir le volet européen de sa candidature. Si, vu de Paris, le transfrontalier constitue un atout du dossier, ici, l'alchimie n'est pas toujours évidente à trouver. Mulhouse se tourne volontiers vers la Suisse, vers Bâle et Zurich quand Strasbourg regarde en Allemagne, dans la direction de Karlsruhe et des clusters du Bade-Wurtemberg. Enfin, comme pour enfoncer le clou de la reconversion industrielle du territoire, deux lieux ont été érigés en " totems " dans la candidature. Le Shadok, lové au milieu du môle Seegmuller, ancien entrepôt portuaire à Strasbourg, a ouvert au public en avril dernier. Porté en régie publique par la Ville, le lieu accueille un fablab, un espace de coworking et veut constituer un point de contact de l'économie créative de l'agglomération. À Mulhouse, des investisseurs privés lanceront en septembre le KM0 sur l'ancien site de la Société alsacienne de constructions mécaniques en partenariat avec l'agglomération. Un techlab, des espaces de formation, des entreprises et des start-up y prendront place pour faire émerger un « village numérique » au coeur de l'ancienne « Manchester française ». De l'avis des porteurs du dossier, si le territoire passait à côté du label French Tech, ce travail a eu le mérite de faire le point sur les forces en présence, qui jusque-là, n'avaient pas toujours su collaborer.

Strasbourg Mulhouse