Coupe du monde de foot : pourquoi vous devez laisser vos salariés en profiter
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Coupe du monde de foot : pourquoi vous devez laisser vos salariés en profiter

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Du 14 juin au 15 juillet se tient la Coupe du monde de football en Russie. L'événement planétaire sera dans tous les esprits pendant un mois. Une actualité brûlante à laquelle ne pourra échapper le monde de l'entreprise. Face à cette distraction extérieure, certains dirigeants ont choisi de laisser le Mondial s'inviter au travail. Leur pari : quitte à risquer de perdre en productivité, autant s'assurer de gagner en convivialité.

Les pronostics de football sont l'un des sports favoris des salariés en période de Coupe du monde, à tel point que des sociétés, comme Corporico, se sont positionnées sur ce marché très saisonnier, pour proposer des solutions numériques aux entreprises — Photo : Corporico

Quelle équipe sera sacrée championne du monde de football le 15 juillet prochain à Moscou ? Si la question obsède les supporters de la planète, elle tient aussi en haleine les salariés français. Et pour cause  : le sport favori en entreprise en ce moment semble être… le pronostic ! Un rituel incontournable auquel Eric Guillermou, manager chez RSM Ouest (une centaine de salariés à Nantes et Laval, CA 2017 de 10 M€), n'est pas près de renoncer.

Tous les deux ans, depuis 2010, l'expert-comptable orchestre, au sein de son cabinet, des concours de paris sur les résultats du Mondial et de l'Euro de football. Mais cette tâche, réalisée en sus de son travail, prend du temps. « J'y passe 2 à 3 heures par semaine pendant le tournoi, mais je délègue aussi à des stagiaires… » Pour gagner en efficacité, Eric Guillermou envisage donc d'abandonner son bon vieux tableur Excel au profit d'une solution en ligne.

Les pronostics, un incontournable en entreprise

Car les paris sportifs entre collègues sont devenus si courants que certaines sociétés se sont lancées sur le marché. C'est le cas de Corporico (250 000 € de CA en 2016), fondé par David Bellaïche et Rony Msika. En plus d'une plateforme de paris, les deux hommes proposent des prestations de communication pour accompagner l'opération. Et pour eux, la Coupe du monde en milieu professionnel, c'est du sérieux.

« Pendant le Mondial, il y aura deux types d'entreprises en France, assure Rony Msika : celles qui vont importer l'événement dans leurs locaux et celles qui feront comme s'il n'existait pas. » Mais ces dernières pourront difficilement y échapper : « Quoiqu'il arrive, vos salariés seront déconcentrés par l'événement », avertit le directeur du développement de Corporico.

« Quoiqu'il arrive, vos salariés seront déconcentrés par la Coupe du monde. »

Certains dirigeants l'ont bien compris. Et voient dans le concours de pronostics une parade à l'absentéisme les jours de matchs. «  L'idée est alors de proposer aux salariés de poursuivre leur passion au sein de l'entreprise, expose Rony Msika. Certes, ils feront des pauses plus souvent. Mais au moins, ils seront présents.  »

Les retransmissions de matchs plébiscitées

Autre levier à disposition de l'entreprise : la retransmission de matchs. Un grand classique aussi, plébiscité par les Français, d'après une consultation réalisée par le site d'emploi Qapa, puisque plus de la moitié des répondants prévoit de regarder des rencontres au travail - un taux qui monte à 81 % chez les hommes !

Là encore, Rony Msika recommande le pragmatisme : « Certains patrons diffuseront les matchs de l’équipe de France, car ils savent qu'une partie des salariés seront collés à leurs écrans pour les suivre discrètement. » D'autant que les Bleus joueront deux fois en semaine lors de la phase de groupes (France-Pérou, le 21 juin à 17h, et Danemark-France, le 26 juin à 16h).

« C'est gagnant-gagnant : on donne de la souplesse, on en obtient en retour. »

Retransmission ou aménagement des horaires, dans tous les cas, ces mesures relèvent du « pouvoir de décision de l'employeur et de son bon vouloir », tient à rappeler Christelle Reinier, juriste chez RSM Ouest. Chez Sendao, éditeur de logiciels basque (une soixantaine de salariés, 4 M€ de CA en 2017), on ne s'en cache pas : la télé sera branchée sur le Mondial. Directeur associé, Ludovic Lefebvre va réaménager les bureaux parisiens de l'équipe commerciale pour « installer correctement le vidéoprojecteur ». Sans oublier d'organiser un concours de fléchettes « pour savoir qui va payer l'apéro » ! Rien de plus normal, pour Ludovic Lefebvre : « C'est gagnant-gagnant  : on donne de la souplesse, on en obtient sans difficulté en retour. »

Dans le bureau parisien de Sendao, les commerciaux prennent le temps de regarder les matchs de l'équipe de France de football devant le poste de télévision de leur open space — Photo : Sendao

Le Mondial de foot, un frein à la productivité ?

Et s'il était là, le secret d'une Coupe du monde réussie en entreprise ? « Il est toujours intéressant de s'appuyer sur un événement extérieur pour créer du lien interne », confirme Eric Guillermou. Son frère Nicolas, gérant de Zen Organisation (7 salariés près de Nantes, 1,27 M€ de CA en 2017), spécialisé dans le team building, acquiesce. « Si un salarié est autorisé à regarder un match, bien sûr, sa productivité chutera sur le moment. Mais sur la durée, il mettra les bouchées doubles pour rattraper le temps perdu, voire remercier son employeur. » Pour sa part, Nicolas Guillermou proposera des tournois de baby-foot en carton pendant la compétition.

C'est que ce genre d'activité autour du Mondial peut devenir un accélérateur de performance pour l'entreprise. Rony Msika l'a constaté avec les pronostics  : « On crée du lien au service de la productivité, entre des personnes qui ne se seraient jamais vues auparavant, parce qu'elles sont à un étage, ou dans une ville, voire un pays différent. Demain, ce collègue, avec qui j'ai parlé foot la veille, si je lui demande un service, il me répondra beaucoup plus vite que si je n'avais jamais échangé avec lui. »

« La Coupe du monde est un excellent moyen pour l'entreprise de prendre la parole avant les vacances d’été et de finir l'année sur une bonne touche.  »

L'événement peut aussi servir les objectifs commerciaux de la société. Directeur commercial de l'agence marketing Muse (20 salariés au nord de Lyon, 8 M€ de CA en 2017), Cyrille Le Meaux conseille ainsi à ses clients d'utiliser la Coupe du monde comme prétexte à des campagnes de motivation et de mobilisation des troupes. « Chaque action de chaque service peut se traduire en "but". Sur cette base, le manager peut monter une opération booster : il en demande plus à ses collaborateurs sur une courte période et il récompense les "buts" marqués à la fin. »

Valoriser les individualités, renforcer le collectif

Et ce n'est pas tout. « La Coupe du monde, poursuit-il, est parfaite pour communiquer sur les enjeux de cohésion d'équipe. L'entreprise a l'occasion de montrer qu'elle ne parle pas que boulot à ses salariés. Et elle peut en profiter pour quantifier leur dynamisme commercial », à travers un concours photo des meilleurs supporters, par exemple. «  Pour une fois, on peut mettre en avant les salariés sur des critères qui ne soient pas basés sur leurs compétences ou leurs résultats professionnels  », approuve Rony Msika.

Le cofondateur de Corporico note un dernier avantage à l'introduction du Mondial dans l'entreprise  : renforcer la marque employeur et fidéliser les collaborateurs. À ce titre, l'événement tombe à point nommé. « La rentrée de septembre correspond souvent à un pic de démissions. La Coupe du monde est donc un excellent moyen pour l'entreprise de prendre la parole avant les congés d’été, en finissant l'année sur une bonne touche. » De quoi faire de ses employés des "ambassadeurs" de la marque sur leur lieu de vacances… et pourquoi pas signer le transfert de l'année à la rentrée.

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